Entre transhumanisme et robonanisme : l’avenir appartient à ceux qui s’automatisent tôt.

Pas un mois, pas une semaine sans que de nouvelles annonces ne laissent présager l'avènement de l'ère des robots ou ne mette sur le devant de la scène l'idéologie du transhumanisme, parfois pour la questionner utilement (voir chez Xavier Delaporte et chez Geoffrey Dorne), d'autres fois pour s'en faire le chantre malgré soi.

L'occurence frappante de ces thématiques n'est pas uniquement dûe à des réelles avancées et percées technologiques, dont l'une des plus récentes et des plus médiatiques fut celle du "nouveau" programme secret de Google, baptisé "Baseline Study" et visant à établir la carte génétique complète d'un individu "sain" afin de lutter cotre diverses maladies et nous promettre un soupçon de vie éternelle (voir notamment ces 3 articles, ici et ou encore , et se souvenir des très anciennes "collusions" de ce moteur de séquençage).

Cette occurence relève aussi et peut-être surtout d'une "normalisation" de ces questions au travers d'une banalisation – médiatiquement entretenue – de la question et de la vieille antienne de "l'intelligence artificielle".

Quand Prométhée fout le feu aux ailes d'Icare.

Et le principal vecteur de cette normalisation vient – selon moi – de la portée médiatique et attentionnelle de "l'internet des objets", dont les voitures sans chauffeur sont la résurgence la plus récente, et que les Google Glasses, même si leur usage reste pour l'instant tout autant confidentiel que sujet à controverse, ont permis d'incarner dans l'inconscient technologique planétaire. Car les Google Glasses sont moins un produit qu'un "tipping point", qu'un point de bascule entre ce qui était jusque là un impensé technologique et un fantasme fictionnel tenant aussi bien du mythe d'Icare que de celui de Prométhée. Icare pour le fantasme d'un dépassement des capacités humaines, et Prométhée pour la transgression que ce dépassement représente.

A la différence, par exemple, des puces sous-cutanées qui – sauf pour quelques illuminati – représentent une technologie assimilable à un "corps étranger" et suscitent dont un mécanisme de rejet, les Google Glasses sont une technologie douce, l'incarnation d'un "soft power", c'est à dire à la fois "doux" et "logiciel" ; une technologie douce parce que non-intrusive et encore "amovible", "réversible", qui pour un coût – relativement – abordable, est la preuve qu'un appareillage technologique du corps est non seulement possible mais également presque anodin.

Robots après tout.

A l'orée donc du 21ème siècle, prend corps une réflexion sociétale mondiale sur ce que nous pourrions appeler notre seuil de tolérance à la robotisation du monde, après une autre mise à l'épreuve qui fut celle de sa mise sous coupe algorithmique réglée

Web. Brain. We Brain. Webrain.

Au-delà des dogmes transhumanistes qui partent de l'individu (enfin en tout cas de son cerveau) pour postuler sa sublimation dans et au travers de la machine (qui sera donc "plus intelligente" que ledit cerveau), au-delà de cette approche que l'on pourrait qualifer de "remplaçionniste" ou "recréationniste" pour autant que ces néologismes ait du sens (les intelligences artificielles auraient vocation à "remplacer" notre cerveau lors de ce fameux "singularity point" à l'échéance fixée autour de 2020 par le gourou Kurtzweill, qui a d'ailleurs conservé le cerveau de son père décédé …), il est en revanche établi et observé scientifiquement que notre cerveau, plus précisément, la configuration neuronale de notre cerveau est modifiée par les usages technologiques en vertu d'un principe de plasticité neuronale dont les premières observations remontent au cas fondateur de Phinéas Gage et à la naissance des neurosciences. Mais là encore la réalité est – heureusement – bien plus retorse que le lissage que prétendent lui appliquer les transhumanistes, car elle relève d'un perçu social objectivable (l'externalisation de nos mémoires d'abord documentaires, puis intimes) qui est à la fois cause et conséquence de nouvelles plasticités neuronales qui modifient elles-mêmes en retour ledit perçu social. Pour le dire plus simplement, le débat est celui du web comme "cerveau extérieur" et des conséquences que cela peut impliquer, avec là aussi, de très zélés prosélytes et de très ardents opposants (dont Nicholas Carr et son fameu "Internet nous rend-il bêtes ?"). Et pour faire ultra-simple au risque d'être caricatural, lorsque les défenseurs de cette thèse postulent que grâce à cette externalisation notre cerveau aura plus de temps et plus de capacité à traiter des tâches plus "nobles", ses détracteurs, eux, s'alarment d'une possible dépendance et/ou d'un risque d'atrophie dudit organe, atrophie et dépendance liées aux mêmes processus d'externalisation.

IA versus AI.

Mais revenons à nos robots. Le débat sur la "robotisation" du monde se divise en deux grandes catégories : "ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui creusent." Ah non ça c'était avant. Donc je disais, le débat sur la "robotisation" du monde se divise en deux grandes catégories : d'un côté ceux qui croient et travaillent sur une "intelligence artificielle" capable tout au moins dans un premier temps de "singer" les processus d'apprentissage de l'homme (deep machine learning ou "apprentissage profond"), et de l'autre ceux qui croient et travaillent dans l'optique d'une "intelligence assistée". Ce qui pose deux problèmes. Le premier, c'est que l'essentiel des chercheurs les plus avancés dans chacune de ces 2 optiques se retrouvent tous les jours … à la cafétéria de Google ou de Facebook. Et le second c'est que l'on a du mal à savoir quels sont ceux qui disposent du pistolet chargé et quels sont ceux qui creusent …

Si l'école "intelligence artificielle" a aujourd'hui clairement la faveur des médias, c'est en revanche assez clairement l'école de "intelligence assistée" qui a celle du grand public et du plus grand nombre de spécialistes / universitaires / chercheurs / industriels, à la fois car elle promet une transition plus douce et toujours sous-contrôle (mais de qui ?), et parce qu'elle produit chaque semaine des preuves tangibles de sa "réalité" (voitures sans chauffeur, lunettes google, etc …)

La surenchère inflationniste de l'IA (intelligence artificielle) s'oppose et parfois se lie à la perspective déflationniste de l'AI (Assistant intelligent**).

** assistants intelligents que l'un des experts du dernier rapport Pew Internet – dont je vais vous parler plus bas – baptise joliment du terme de "Concierge-type services"

L'intelligence du lien.

Argument autant classique qu'inévitable dans ce débat, la définition même du terme "intelligence". J'ai déjà montré, ab absurdum mais pas tant que ça quand même, que si l'on s'en tient à l'étymologie première (capacité de créer des liens), les "bots" et leurs algorithmes ont d'ores et déjà gagné la bataille de l'intelligence :

"A moins bien sûr que ce que l'on appelle intelligence n'ait déjà essentiellement changé de camp : le web comme proto-organisme géré, parcouru et principalement visité par … des robots concourant eux-mêmes à créer une intelligence collective artificielle, des robots qui depuis longtemps déjà éditent et corrigent nos articles sur Wikipédia, des robots qui rédigent eux-mêmes des articles, des robots qui changent eux-mêmes les titres de nos pages web s'ils les jugent trop mauvais

Et si c'était nous qui imitions ces robots ? Et si lorsque nous rediffusons un article sans le lire nous ne faisions finalement rien d'autre qu'imiter ces … robots ?? Si l'intelligence est la capacité de créer du lien, comment aujourd'hui prétendre nier que nous faisons d'ores et déjà face à une formidable et parfaitement inédite forme d'intelligence "automatique" du côté des machines et des algorithmes ? Et que de l'automatique à l'artifice … Mais comment ne pas voir du même coup l'évidence qui veut que l'essentiel de l'activité en ligne de l'essentiel des internautes ne soit un retour en arrière vers un degré zéro de l'intelligence : même plus la capacité de créer des liens, seulement celle d'en rediffuser d'existants, qui nous sont eux-mêmes souvent proposés par la machine, par l'algorithme."

Bien avant cela, leur première victoire fut de parvenir à nous convaincre et à nous imposer les logiques du "like" en lieu et place de celles du lien ayant jusqu'ici prévalues.

Automatisez-moi. Mais pas tout de suite. Pas trop vite.

Comme à chaque point de saillance médiatique des questions liées à l'automatisation de tâches jusqu'ici dévolues aux humains, se pose la question du "remplacement". Des premiers luddites combattant les premiers métiers à tisser à l'aube de la révolution industrielle du 19ème siècle, nous voici parvenus au seuil d'une nouvelle querelle des anciens et des modernes avec comme horizon la redéfinition des règles de la productivité, du capitalisme, et de la notion même de travail. Il est très frappant de constater les similitudes qui existent dans la manière de traiter ces questions à pourtant deux siècles d'écart : mêmes angoisses, mêmes dogmes, mêmes croyances, mêmes incertitudes, et pourtant même sentiment d'inévitable, d'inéluctable.

C'est dans ce contexte que le le Pew Internet vient – le 6 août – de livrer sa dernière étude sur "L'intelligence artificielle, la robotique et le futur de l'emploi". Dont voici les principales conclusions 🙂

  • Les avancées technologiques ont toujours fait disparaître certains emplois mais, historiquement, elles en ont toujours davantage créé que supprimé.
  • Des métiers entièrement nouveaux apparaîtront qui reposeront sur les capacités humaines non transférables à la machine.
  • Notre rapport au travail sera modifié d'une manière positive et socialement bénéfique … mais …
  • Certaines personnes disposant de très hautes compétences rencontreront le succès dans ce nouveau contexte mais la majorité se retrouvera orientée vers des métiers moins bien rémunérés (= phénomène de déclassement)
  • La "classe moyenne" continuera d'être déclassée et l'on verra l'émergence masse d'un nouveau sous-prolétariat technologique.
  • Le système éducatif, les institutions politiques et économiques sont complètement à la ramasse.
  • Nos structures sociales, économiques et les différentes instances de régulation minimiseront l'impact de la robotique et de l'AI sur le secteur de l'emploi.

Voilà pour les grandes tendances et points-clés de ce rapport. Entrons maintenant un peu dans le détail. Des avis des nombreux experts consultés dans ce rapport je retiens les points suivants ainsi que quelques citations :

  • l'essentiel des "nouveaux" métiers auront à voir avec la supervision (supervision de services effetués par des robots, ou supervision des robots eux-mêmes)
  • "en remontant ne serait-ce que 15 ans en arrière, qui aurait pu croire que le SEO (search engine optimization) représenterait une catégorie d'emploi aussi significative et importante ?"

Dont acte.

Automatiser plus pour travailler moins.

  • "Les avatars humains électroniques dotés de substantielles capacités de travail ne sont qu'à quelques années de nous, et non à quelques décades."
  • "La question centrale de 2025 sera : "que feront les gens dans un monde qui n'a plus besoin de leur travail et où seulement une minorité suffit à guider une économie à base de robots ?" ("the bot-based economy")
  • "En quoi les hommes pourront-ils y contribuer ? Le réponse courte est que les emplois pour lesquels il est impossible de répondre positivement à cette question cesseront tout simplement d'exister."

Et oui. Car il va falloir s'habituer à travailler 12 heures par semaine, ou peut-être moins, et là ce n'est ni DSK ni Martine Aubry qui le disent, mais Hal Varian. Ce qui n'impliquera d'ailleurs pas nécessairement – toujours selon lui – qu'il y aura moins d'emplois : 

"Le temps de travail hebdomadaire est tombé de 70 heures par semaine à 37 heures aujourd'hui, et je m'attends à ce qu'il continue de chuter. C'est une bonne chose. Tout le monde veut plus d'emplois et moins de travail. Les robots de différentes formes permettront de travailler moins, mais la durée du temps de travail hebdomadaire continuera de décroître, afin qu'il y ait toujours le même nombre d'emplois (en fonction de paramètres démographiques bien sûr). C'est ce qu'il se passe depuis les 300 dernières années et je ne vois aucune raison que cela s'arrête dans la prochaine décennie."

Et un autre expert de souligner, toujours d'un point de vue diachronique :

"Depuis les 200 dernières années, un grand nombre de technologies ont augmenté considérablement la productivité en détruisant des emplois ; pour autant, le "chômage technologique à grande échelle" n'a jamais été une réalité sur le long terme. Alors il semble improbable que de nouvelles technologies de production détruisent plus d'emplois qu'elle n'en créeront. L'économie continuera d'évoluer vers des catégories de services à la personne plus difficiles à automatiser."

Sur ce dernier sujet (la robotisation des services à la personne), on lira d'ailleurs très utilement la tribune de Zeynep Tufekci, "Failing the Third Machine Age : When robots come for Grandma", et sous-titrée : "Why Caregivers robots are both inhuman and economically destructive" (pourquoi les "robots de soin" sont à la fois inhumains et économiquement destructeurs)

Le grand retour du "bio" … logique.

Toujours selon certains experts interrogés dans l'étude du Pew Internet, et un peu à la manière dont l'industrialisation de la production agro-alimentaire a déclenché socialement, culturellement et économiquement un renouveau de l'attirance pour le "bio", l'automatisation de pans entiers de notre vie va inaugurer "un retour vers des formes strictement "humaines" de production" (l'artisanat quoi …).

Politique de bits et société de bots.

  • "nous sommes à l'orée d'un "saut" sociologique : les technologies sont prêtes mais nous ne le sommes pas ; du moins pas encore."
  • "une avancée technologique peut, en elle-même, être positive ou négative du point de vue de l'emploi, mais cela dépend de la structure sociale envisagée comme un tout. C'est moins une conséquence technologique qu'un choix politique."

La prochaine fracture numérique risque de virer à l'émeute.

Car en plus des arguments déjà évoqués sur l'essor d'un sous prolétariat technologique, en plus du déclassement accéléré des classes moyennes, "This will be very socially divisive. As power shifts from labor to capital, inequality will increase and social stability will decrease."

Soft and invisible.

A l'instar du "soft power" que j'évoquais plus haut, Danah Boyd indique que la plupart de ces nouvelles automatisations, dans le travail comme dans les loisirs et la vie sociale, seront "aussi invisibles qu'elles le sont aujourd'hui". Et de poursuivre :

"So in that sense, yes, it will be part of the ordinary landscape. The biggest change will be to the movement of atoms—food, consumer goods, etc. The majority of the disruption will be at the blue-collar level, and I suspect that the biggest impact will be in warehouses (or ‘fulfillment centers’)."

La voix du bot est impénétrable.

J'ai évoqué plus haut dans ce billet la tension entre "la surenchère inflationniste de l'IA (intelligence artificielle)" et "la perspective déflationniste de l'AI (Assistant intelligent)". Et je suis déjà longuement revenu sur ce blog sur le rôle de la voix (ici et ) et des interfaces vocales en général. Et même si Hal Varian n'a pas besoin de lire ce blog, cela fait tout de même plaisir de le voir partager cet avis 🙂

"Nous nous reposerons sur des assistants personnels tels que Google Now, Siri, Watson, etc. La plupart des interactions seront orales, donc cela ressemblera beaucoup aux interactions avec les ordinateurs dans star Trek. Nous attendrons des ordinateurs auxquels nous serons confrontés qu'ils nous connaissent et se souviennent des interactions que nous avons eu avec eux. En général ils devineront ce que nous voulons, et notre rôle sera simplement d'affiner et de vérifier qu'ils ne se trompent pas. (…) Les interactions quotidiennes avec les terminaux et les données se feront par la voix. L'industrie (sic) qui sera le plus spectaculairement affectée sera l'éducation : qu'est-ce que les gens doivent apprendre lorsqu'il peuvent, en permanence, avoir accès à l'ensemble des connaissances humaines ?"

La prochaine industrie du luxe sera celle … du contact humain !

Et sera probablement l'occasion de la revanche des femmes. Ben oui messieurs. Car d'un côté, "Live, human salespeople, nurses, doctors, actors will be symbols of luxury, the silk of human interaction as opposed to the polyester of simulated human contact." Et, comme le souligne Jamais Cascio (écrivain) :

"La plus grande exception, ce seront les métiers qui reposent sur l'empathie comme coeur de compétence – enseignant, aide à domicile, infirmière. Ces métiers sont souvent ceux qui traditionnellement sont effectués par des femmes. L'une des questions sociales majeures de la fin 2020 tournera donc autour du rôle restant aux hommes dans ce monde."

De toute façon, comme le rappelle Alex Havalais, "Dès maintenant, des secteurs comme la restauration, le voyage et l'hospitalité ("hospitality") restent sous contrôle humain davantage pour des raisons culturelles que purement économiques, en tout cas je le suppose".

Voilà pour le rapport du Pew Internet. Un rapport dont les conclusions ne sont sans doute pas étrangères au contexte socio-professionnel des experts interrogés (même si on y trouve quelques universitaires "pur jus", la plupart d'entre eux/elles travaillent pour ou sont impliqués dans des sociétés à très fort potentiel technologique). N'en reste pas moins un foisonnement de problématiques, de remises en contexte et d'approches essentielles pour mieux penser les bouleversements en cours. A la marge, il fournit par ailleurs un excellent argumentaire en faveur d'une accélération de la réflexion autour du "revenu de base", cette "utopie de plus en plus réaliste" … 😉

Une fois digérée sa lecture, les angles offerts pour aborder ces questions vont de l'économique au politique en passant par le social. Il en est un pourtant qui me semble aussi important et qui n'est pas du tout mentionné : celui de la "privauté", de la "privacy" comme disent les anglo-saxons. 

Privacy jobs. Privé d'emploi ou emploi public ?

La question de la "privacy" (jetez-vous sur le dernier billet de Danah Boyd) peut permettre d'offrir une intéressante clé de compréhension supplémentaire, même si elle paraît, a priori, totalement déconnectée de la question de l'employabilité ou du devenir de certains métiers. Le "travail" a en effet, en tout cas depuis les débuts de l'ère industrielle, constitué la première ligne de démarcation stable entre le domaine du "public" ou à tout le moins du "social" (quand nous "sommes" au travail) et celui de l'intime et de la "privacy" (quand nous n'y "sommes" plus).

Les logiques de "travail distant" inaugurées par le numérique, mais également celles du "travail gratuit" ( ou de "l'internaute en travailleur exploité") qui sont aujourd'hui devenues routinières et inscrites dans une boucle de traitement algorithmique qui fonde l'hypothèse d'un capitalisme linguistique, ces logiques, disais-je, ont co-évoluées avec la perception que nous avions des questions de "privacy". Voilà pourquoi leur observation pourrait, au même titre qu'une analyse macro ou micro-économique, permettre d'y voir un peu plus clair dans l'inéluctable automatisation du monde.

La privacy dominera le monde.

Je prends juste deux exemples.

Exemple 1 : Quel est le point commun de l'ensemble des métiers évoqués comme "résistant le mieux" à l'automatisation, c'est à dire les métiers du service à la personne, ceux du soin, ceux de l'enseignement, ou, dans une moindre mesure, du tourisme et de la restauration ? Il s'agit à chaque fois de métiers dans lesquels le statut de la "privacy" occupe une place très particulière, un espace précisément trop flottant ou subjectif pour permettre une automatisation systémique ou systématique.

Exemple 2 : Et quel sera le premier impact (déjà observable) de la baisse du temps de travail hebdomadaire ? Et oui. Une redéfinition progressive des frontières de cette même "privacy", puisqu'en étant moins de temps "au travail", nous passons et passerons encore plus de temps dans des activités "de loisir", de "distraction" ou de simple "occupation", activités dont le coeur de service et le fondement économique est précisément de flouter et de faire sans cesse bouger les frontières de la "privacy" comme Facebook en est pour l'instant l'indépassable parangon.

Bradbury à Disneyland.

En attendant l'avènement du transhumanisme ou de toute autre forme de robonanisme, terminons par la voix de la sagesse, en tout cas celle de Ray Bradbury qui, dans une lettre de 1974 adressé à un de ses amis, qui après la visite du premier parc Disneyland (rappel : nous sommes en 1974) se disait effrayé par les robots qu'il y avait rencontré, ou plus exactement par "l'utilisation que Disney fait de créations "audio-animatroniques" dans Disneyland." Bradbury lui répondit ceci :

"Can’t resist commenting on you fears of the Disney robots. Why aren’t you afraid of books, then? The fact is, of course, that people have been afraid of books, down through history. They are extensions of people, not people themselves. Any machine, any robot, is the sum total of the ways we use it. (…)

So it is finally with the robots you say you fear. Why fear something? Why not create with it? Why not build robot teachers to help out in schools where teaching certain subjects is a bore for EVERYONE? Why not have Plato sitting in your Greek Class answering jolly questions about his Republic? I would love to experiment with that.

I am not afraid of robots. I am afraid of people, people, people. I want them to remain human. I can help keep them human with the wise and lovely use of books, films, robots, and my own mind, hands, and heart.

I am afraid of Catholics killing Protestants and vice versa.

I am afraid of whites killing blacks and vice versa.

I am afraid of English killing Irish and vice versa.

I am afraid of young killing old and vice versa.

I am afraid of Communists killing Capitalists and vice versa.

But…robots? God, I love them. I will use them humanely to teach all of the above. My voice will speak out of them, and it will be a damned nice voice."

 

<Mise à jour du surlendemain> Voir cette liste de 162 métiers qui n'existent pas encore </mise à jour du surlendemain>

 

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