Les meilleures définitions sont souvent celles a contrario. «L’hypertexte ne peut pas être imprimé. » [Moulthrop 95]. Si l’hypertexte demeure principalement un outil, il est avant tout un outil médiatique. Et son pendant, son média le plus directement inverse est l’imprimé. L’impression d’un véritable hypertexte (nous laisserons pour le moment de côté les récits arborescents ou combinatoires) le prive de son essence : « il s’agit d’un concept unifié d’idées et de données interconnectées, et de la façon dont ces idées et ces données peuvent être éditées sur un écran d’ordinateur. » T. Nelson.
Une fois avérée l’évidence de l’outil, une fois constatée son inscription indélébile dans notre sphère de réalité, l’hypertexte se dote de résonances d’ordre philosophique. « L’hypertexte est peut-être une métaphore valant pour toutes les sphères de la réalité où des significations sont en jeu » [Lévy 90 p.29].
S’il est un concept fondateur c’est aussi parce qu’il offre de conjuguer de manière originale la sphère du technologique et celle de l’intelligence. « L’hypertextualité est plus une révolution technologique qu’intellectuelle : mais comme l’a démontré Mc Luhan, l’une devient l’autre avec le temps. » [Pickering 94]
C’est dans cet espace médian que les prochaines conquêtes intellectuelles sont probablement à faire et déjà à l’œuvre. Quelles que soient les contrées épistémologiques dans lesquelles l’humanité avance, elle est perpétuellement en quête de sens. L’essor de la technologie lui en fournit sans cesse de nouvelles, tout en modifiant radicalement et parfois définitivement les espaces déjà conquis.
« L’hypertexte est le destin de la pensée ». Leroy-Gourhan.
Il ne reste qu’un pas à franchir pour que la technique – émanation de l’outil – trouve son inscription au cœur du biologique, pour qu’elle devienne une incarnation de « la logique du vivant ». Il semble dès lors normal de laisser le dernier mot à celui qui est à l’origine de l’expression réunissant en un même syntagme ces deux pans fondamentaux de notre existence : « L’homme numérique ». « Hypertexte : technique qui reproduit partiellement le fonctionnement du cerveau humain en établissant des liaisons entre plusieurs informations. » [Negroponte 95 p.18]
Voilà donc pour ce que nous avons tenu à présenter sous la forme d’un « florilège » hypertextuel afin que le lecteur dispose de la vue la plus large possible des questions que soulève l’hypertexte et que, dans le même temps, il puisse commencer à distinguer les principes d’organisation que nous allons maintenant détailler et qui constituent le socle de notre thèse : quels sont les nouveaux lieux, les nouveaux agencements, les nouveaux espaces ouverts à la pensée, lorsque des modalités de liaison entièrement nouvelles investissent et transforment les cadres traditionnels de nos habitus ?
Bonjour,
J'ai suivi tes billets du blog de l'URFIST à Affordance. Félicitations pour cette nomination.
Une suggestion à propos de ces premiers billets "publication de thèse" : ne pas aller trop vite. Distiller tes écrits à petites gouttes pour nous laisser le temps de les apprécier.
Merci.
Rédigé par : Sylvie Le Bars - Arkandis | 08 septembre 2005 à 14:19
Bonjour Sylvie,
Comme tu peux le voir, le rythme s'est déjà ralenti ;-)
Rédigé par : olivier | 09 septembre 2005 à 11:19
Bonjour,
Mais ça se lit comment une thèse sur un blog ? Avez-vous pensé que la nature éditoriale de l'objet posait quelque question quand il devient une somme de fragments juxtaposés ?
Un autre mode de publication ne demande-t-il pas un réarragement ?
Bonne continuation, tout de même!
Rédigé par : Sarah | 11 décembre 2007 à 14:45
Si un hypertexte ne peut être imprimé, qu'en est-il des "étiquettes graphiques" de type code 2D que l'on appelle déjà des "hyperliens mobiles" ? Si une étiquette graphique est la représentation graphique de données numériques, et que nos téléphones portables font office de scanner, l'imprimé acquiert alors au moins une "dimension hypertextuelle" ? Qu'en pensez-vous ?
Rédigé par : JA | 22 juillet 2008 à 12:34
Bonjour,
Juste 2 petits commentaires :
- Leroy Gourhan s'écrit Leroi Gourhan
Je n'ai pas trouvé trace de sa citation attribué à Leroi Gourhan mais plutôt une analyse de Bertrand Stiegler "Leroi-Gourhan voit dans ce qu'on a depuis baptisé l' hypertexte le destin de la pensée", dans la Technique et le Temps : la désorientation p112. Qu'en est il ?
Merci
Vincent
Rédigé par : Vincent | 04 février 2016 à 11:49